Le Système d’entrée et de sortie (EES) : contrôle européen de l’espace Schengen et impact sur l’Andorre
L’EES enregistre numériquement les entrées et sorties aux frontières extérieures de Schengen et calcule la durée 90/180. Explication de ses effets sur l’Andorre et les résidents non Schengen.

Temps de lecture : 9 minutes
👤 L’espace Schengen et la libre circulation des personnes
L’espace Schengen constitue l’un des piliers essentiels de l’intégration européenne.
Il est né de l’Accord de Schengen de 1985 et de sa Convention d’application de 1990, avec pour objectif de permettre la libre circulation des personnes dans une zone commune sans contrôles frontaliers internes.
Depuis, Schengen a évolué vers un espace de mobilité partagée, où les contrôles ne s’exercent qu’aux frontières extérieures.
Contrairement à l’Union européenne, Schengen ne régit ni les marchandises ni les capitaux, mais exclusivement le déplacement des personnes et la coopération policière associée.
On distingue trois catégories d’États :
- Pays de l’UE membres de Schengen, comme l’Espagne, la France, l’Italie ou l’Allemagne.
- Pays de l’UE non membres de Schengen, comme l’Irlande ou Chypre.
- Pays non membres de l’UE mais appartenant à Schengen, comme la Norvège, la Suisse, l’Islande ou le Liechtenstein.
En résumé, l’Union européenne légifère sur la politique et l’économie, tandis que l’espace Schengen coordonne la mobilité humaine et la sécurité commune.
⚖️ Le Règlement (UE) 2017/2226 et la création du système EES
Le Règlement (UE) 2017/2226, adopté le 30 novembre 2017, crée le Système d’entrée et de sortie (EES), un mécanisme européen qui remplace le cachet manuel des passeports par un registre électronique automatisé.
L’EES s’appliquera à tous les ressortissants de pays tiers (c’est-à-dire les personnes ne possédant pas la nationalité d’un État Schengen) et permettra de :
- Enregistrer la date, l’heure et le lieu d’entrée et de sortie.
- Intégrer des données biométriques (empreintes digitales et image faciale).
- Calculer automatiquement la durée du séjour autorisé (90 jours sur 180).
- Détecter automatiquement les dépassements de séjour.
Le système est géré par l’agence eu-LISA, également responsable d’autres grandes bases de données européennes telles que le VIS (Système d’information sur les visas) ou Eurodac.
Son objectif est double : renforcer la sécurité commune et accélérer la circulation légale des personnes aux frontières extérieures.
🌍 Champ d’application : uniquement aux frontières extérieures de Schengen
Bien qu’il s’agisse d’un règlement européen, l’EES ne s’applique pas à toute l’Union européenne, mais uniquement aux frontières extérieures des États appartenant à l’espace Schengen.
Cela signifie que :
✅ Les frontières extérieures (comme Espagne–Maroc ou France–Andorre) sont concernées, tout comme les pays Schengen hors UE (Suisse, Norvège).
❌ Les frontières internes (comme France–Espagne) ne sont pas soumises au contrôle EES.
❌ Les pays de l’UE non Schengen (Irlande, Chypre) n’appliquent pas le système.
Ainsi, l’EES est une initiative propre à Schengen, et non à l’Union européenne dans son ensemble, même si sa mise en œuvre est coordonnée par la Commission européenne.
🎯 Objectifs principaux du système
Le système EES poursuit trois objectifs essentiels :
1️⃣ Renforcer la sécurité commune.
Grâce à un registre numérique et biométrique unique pour tous les États Schengen, il permet d’identifier les séjours irréguliers et de prévenir les infractions transfrontalières.
2️⃣ Simplifier les formalités frontalières.
Le nouveau système remplace les cachets manuels par un scan rapide du passeport et des données biométriques, réduisant les temps d’attente et les erreurs humaines.
3️⃣ Améliorer la coopération policière et antiterroriste.
Les autorités nationales et Europol auront accès au registre à des fins de sécurité, dans un cadre juridique commun.
📅 Mise en œuvre et calendrier prévisionnel
Bien que l’EES ait été adopté en 2017, son déploiement technique a pris du retard.
L’interconnexion entre les systèmes nationaux, l’infrastructure biométrique et la formation des agents frontaliers ont nécessité davantage de temps que prévu.
Selon la Décision (UE) 2025/1544, le système entrera en vigueur le 12 octobre 2025 et atteindra sa pleine opérationnalité au printemps 2026.
Entre-temps, tous les États Schengen achèvent les tests de compatibilité avec le registre central européen.
🇦🇩 Le cas de l’Andorre : une singularité européenne
L’Andorre ne fait partie ni de l’UE ni de Schengen, mais elle est située entre deux pays pleinement intégrés à l’espace Schengen : l’Espagne et la France.
Cette situation géographique fait de ses frontières des points de passage incontournables entre l’espace européen et un territoire tiers.
🤝 Les accords qui régissent la relation
Les relations entre l’Andorre, l’Espagne et la France reposent sur :
- Le Traité de bon voisinage, d’amitié et de coopération (1993), qui reconnaît la souveraineté andorrane et établit la coopération institutionnelle.
- Les accords trilatéraux du 4 décembre 2000 (en vigueur depuis 2003), qui régissent l’entrée, la résidence et l’établissement des ressortissants des trois pays, ainsi que le régime applicable aux ressortissants de pays tiers.
Grâce à ces accords, les Andorrans peuvent résider et s’établir en Espagne et en France selon un régime comparable à celui de Schengen, tandis que les Espagnols et les Français peuvent entrer en Andorre sans visa.
L’Andorre bénéficie ainsi d’une liberté de circulation pratique avec ses deux voisins, tout en restant extérieure à Schengen.
🌐 Entrer et sortir de Schengen via l’Andorre
Pour l’Union européenne, les postes frontaliers andorrans —La Farga de Moles et le Pas de la Case— sont considérés comme des frontières extérieures de Schengen.
Cela signifie que le système EES sera activé à la fois pour les entrées et pour les sorties des ressortissants de pays tiers traversant ces points.
Lorsqu’une personne issue d’un pays non Schengen entre en Andorre depuis l’Espagne ou la France, le système enregistre une sortie de l’espace Schengen.
Lorsqu’elle retourne en Espagne ou en France, une nouvelle entrée est enregistrée.
Cela permet de calculer automatiquement la durée totale de son séjour (90/180 jours) et d’en vérifier la régularité.
En pratique :
- Les citoyens andorrans, espagnols ou français ne seront pas enregistrés.
- Les résidents andorrans titulaires d’un passeport Schengen (italien, allemand, portugais, etc.) non plus.
- En revanche, les résidents non européens (russes, chinois, algériens) ou les touristes extracommunautaires (japonais, américains) seront enregistrés à chaque passage.
Même si ce système peut sembler redondant, sa logique juridique est claire : l’enregistrement des entrées et sorties n’appartient pas à l’Andorre mais à l’UE, et sert à comptabiliser le séjour dans l’espace Schengen, non sur le territoire andorran.
🏛️ Compétence et effets pratiques pour l’Andorre
Les frontières extérieures de Schengen relèvent de la compétence exclusive de l’Union européenne.
Cela signifie que :
- L’Espagne et la France ne peuvent pas modifier unilatéralement le fonctionnement de l’EES.
- Les accords bilatéraux avec l’Andorre doivent rester compatibles avec le droit européen.
- L’UE ne peut pas les abroger, mais elle peut en encadrer l’application afin de garantir que les contrôles respectent les standards communs.
Ainsi, l’impact sur l’Andorre est indirect mais inévitable : le pays ne gère pas le système, mais tous les déplacements internationaux passent par des frontières européennes où celui-ci s’applique.
Conclusion
Le Système d’entrée et de sortie (EES), instauré par le Règlement (UE) 2017/2226, marque une étape décisive dans la gestion numérique et coordonnée de la mobilité au sein de l’espace Schengen.
Il vise à enregistrer électroniquement les passages aux frontières, à calculer la durée des séjours et à renforcer la sécurité commune, avec une mise en œuvre progressive entre 2025 et 2026.
Bien que l’Andorre ne fasse pas partie de Schengen, sa position géographique —encerclée par l’Espagne et la France— fait que tout déplacement international passe par des frontières Schengen, et qu’elle soit donc indirectement concernée par l’EES.
Les accords trilatéraux de 2000 n’influent pas sur le fonctionnement du système, mais garantissent un cadre stable de coopération et de reconnaissance mutuelle, favorisant la mobilité entre les trois pays.
En définitive, l’impact de l’EES sur l’Andorre est davantage géographique que juridique : le pays n’appartient pas au système, mais sa connexion physique avec Schengen fait que ses résidents et visiteurs —notamment les non Européens— en ressentiront les effets pratiques.
Si vous souhaitez comprendre comment l’EES peut vous concerner selon votre nationalité, votre statut de résidence ou votre projet personnel ou professionnel, vous pouvez demander votre rendez-vous personnalisé ci-dessous, ou remplir le formulaire de contact.
Date de dernière révision : octobre 2025



